Les turuq
ou
confréries religieuses
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Qadiriya
Il semble que ce fût à
Bagdad, que Abd al Qâdir fonda, sinon la première
tariqa, du moins la première grande confrérie systématiquement
organisée que l'on retrouve de l'Indonésie à
l'Afrique.
Sohrawardiya
Le second ordre du point de vue
chronologique la Sohrawardiya du nom de Shihab al-Dîn
Sohrawardi (539--632/1144-1234). Neveu du recteur de la madrassa
Nizâmîya dont il reçut l'enseignement, il
compo-sa un traité de Soufisme à l'usage des débutants
(commençants), Adab al Mouridine. Mais son ouvrage
le plus fameux demeure 'Awarif al Ma'arif (les
bienfaits des connaissances spirituelles) où il traite
de l'âme, de l'esprit et de l'intellect de manière
à se démarquer des définitions des falasifas.
Cet ouvrage restera une référence pour les adeptes
de l'ordre. Cet ordre est très présent en Asie
et notamment au Pakistan.
Chadhiliya
C'est le troisième par
ordre chronologique. Son fondateur, Nour ad-Dine Ahmed b. Abd
Allah al- Chadhili (593-656/1196--1258).
Ce disciple d'Ibn Mashîsh fit tant d'adhérents à
Tunis que les autorités en furent inquiètes au
point où il chercha refuge en Alexandrie. Il reçut
un accueil si encourageant, qu'il continua son enseignement de
la discipline et du rituel soufi. L'ordre des Chadhiliya est
encore vivace au Maghreb et au Proche-Orient.
Mawlawiya
Son fondateur, Jalal eddine Rûmi
naquit en Asie centrale en 604/1207 à Balkn. Cette ville
fut enlevée par les mongols et la famille de Rûmi
entama un long périple entre Bagdad, Damas, La Mecque
pour se fixer enfin à Qonya en Anatolie. C'est dans cette
ville que Rûmi fit connaissance avec le beau-fils et disciple
d'Ibn 'Arabi: Sadreddine Qonyawi dont il hérita de la
charge de mufti et de prédicateur.
Son oeuvre la plus connue et régulièrement
citée est le Mathnawi; un poème fleuve de
vingt--six mille distiques. Cet ouvrage fait l'apologie de l'imagination
active face aux spéculations restric-tives des philosophes.
Rûmi surnommé Mawlâna ou Melvana en turc,
fonda l'ordre des Mawlawîya qui connut un essor extraordinaire
à l'époque ottomane.
Il était présent dans tout l'empire jusqu'à
Belgrade, en Bosnie et dans l'Asie mineure.
Rifaiya
Une confrérie très
puissante en Égypte et en Syrie jusqu'au XVe siècle,
où elle connut un déclin progressif au profit de
la Qadiriya. Fondée au XIIe siècle par Ahmad ar-Rifâî.
Naqshbandiya
Issue de Bahaudin Naqshabandi
(1340-1413), célèbre pour sa pratique du Dhikr
(prière) s'accompagnant d'une rétention du souffle.
L'ordre qui naquit dans la région de Boukhara, s'est étendu
à l'Iran, à l'Anatolie, au Caucase et à
l'Afghanistan.
Khalwatiya
Fondée par al-Khalwati
(mort en 1397) qui se répandit en Syrie et eut une grande
renommée au XVIIe siècle.
Rahmaniya
Créée en 1750 par
un cheikh Kabyle et qui devint très importante en Algérie
avec 170 centres. C'est une ramification de la Khalwatiya.
Idrisiya
D'Ibn Idris (1760-1737), à
laquelle se rattache la Senoussiya, fondée en 1840 par
As-Senoussi, très active en Tunisie. Toutes deux dépendent
de la Qadiriya. En outre, il existe des branches récentes
de ces mêmes ordres qu'il serait long de citer de manière
exhaustive. Si les ordres se sont multipliés en terre
d'islam ce n'est pas toujours sans problèmes et sans heurts.
Parce qu'il arrive toujours un moment où l'autorité
se trouve lésée par un succès dont elle
ne serait pas à l'initiative. A chaque fois un ordre acquiert
un ascendant sur les masses, il attire ipso facto le courroux
des zélotes empressés de justifier leur place auprès
du souverain. Ainsi, il en fut en 1812, par exemple, où
les docteurs de la loi orthodoxe obtinrent du Sultan de Fès,
Moulay Slimane, une interdiction radicale des confréries.
Il en résulta une révolte générale
des tribus et le fils du sultan ne put régner qu'après
avoir abandonné la restriction ordonnée par son
père. En Arabie, la wahabisme avait résolu de combattre
les confréries et le culte des saints. Cette hostilité
à l'égard des confréries avait déjà
trouvé aux XIII-XIVe siècles son héros en
la personne d'Ibn Taïmiya à qui on doit Manhaj
as-Sunna, (voie de la tradition) ouvrage polémique
en réponse à Manhaj al-Karama (voie du charisme)
composé par Allameh Hillî (726/1326).
Plus près de nous, en Algérie, le mouvement des
'Ulémas d'inspiration wahhabite, s'empressa de dénoncer
"le maraboutisme obscurantiste". En Turquie, le champion
de la laïcité, Attaturk supprima tous les centres
religieux en 1925. Le Mawlawiya se réfugia un temps à
Alep en Syrie avant d'être de nouveau chassée. Après
les salves essuyées de la part des puritains (Salafiya,
'Ulémas, etc.) et des "modernistes" version
Mustapha Kemal les ordres religieux, loin d'être décapités,
retrouvent sans peine leur légitimité spirituelle
et sociale; car quoi qu'on fasse, l'humanisme ne peut être
jamais dépassé.
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